vendredi 14 mars 2008

Le château - Franz Kafka

Par Thom

S’il ne fallait en garder, ce serait sans doute celui-ci.


Comme tous les romans de Kafka, « Le Château » a été publié à titre posthume. En seconde position, un an après « Le Procès ». Mais en réalité, c’était son ultime projet, celui auquel il consacra les dernières années de sa vie, et ça se sent : ce livre-ci est infiniment plus subtil, plus complexe et plus achevé que ses deux autres romans. C’est une incroyable mine d’or, un mælstrom de l’art kafkaïen dans toute sa splendeur.

K. débarque un soir dans un village. Qu’est-ce qu’il fout là ? on ne sait pas trop. Il cherche le Château. Il veut s’y rendre, il veut l’affronter. Qu’est en réalité ce château ? Existe t’il même réellement ? Et si oui quelles sont les motivations de K. ?

Voilà pour la mise en bouche. La suite, c’est un brouillard total, un magma de mots et de phrases, un ensemble compact, étrange, fou, parfois à la limite du compréhensible. C’est la seconde fois que je le lis, et je n’en ai pas encore saisi toute la symbolique ni découvert tous les secrets. Il est extrêmement difficile, lorsqu’on s’intéresse au trois romans de Kafka, de leur donner une chronologie correcte et de savoir quels étaient les buts poursuivis par leur auteur. Mais « Le Château » me semble différent du « Procès » et de « L’Amérique », par bien des aspects. En général, les critiques ont plutôt tendance à marginaliser « L’Amérique », justement, qui pourtant est le plus typiquement kafkaïen des trois. Alors que « Le Château »…il nous montre un protagoniste en quête de reconnaissance et d’accomplissement personnel. Cette reconnaissance viendra du Château et de ce qu’il en retirera, le cas échéant, mais on peut sans trop extrapoler supposer que cette reconnaissance-là est la même reconnaissance que Kafka n’a jamais su trouver de son vivant. Que les frustrations de K. sont des échos aux propres frustrations de l’auteur. Ce que je veux dire par-là, c'est que la divergence fondamentale entre les deux autres romans de Kafka et celui-ci, c’est que K. existe. Il a un caractère, un comportement, une attitude. Un but, aussi, surtout. Ok, on ne comprend pas toujours quel est ce but , mais but il y a. K n’est pas, comme Joseph K. (« Le Procès ») ou Karl Rossmann (« L’Amérique ») une victime…du moins pas tout à fait. Il est broyé, lui aussi, non par un système ou un pays mais par un Château. Saut que contrairement aux deux antihéros susmentionnés il est maître de son destin, et il se défend. Ce n’est pas une quiche, un flat character sur lequel Kafka se défoule, mais un authentique personnage qui essaie de survivre au lieu de se laisser porter par les évènements. Puisqu'il est le dernier des trois personnages à avoir été créé, peut-être même peut-il être vu comme une sorte de réponse aux deux autres.

Tout cela, évidemment, rend encore plus navrant le fait que ce roman ne soit pas achevé, quoique cette fin en suspens corresponde à mon goût assez bien à l’atmosphère générale du bouquin.

On peut toujours ergoter sur ce qu’aurait pu ou dû devenir « Le Château »…je connais même un type qui, très sérieusement, a décidé un jour d’en écrire la fin !

Ou alors, on peut s’amuser en se disant que, peut-être, si les romans de Kafka avaient été achevés les mystères auraient été élucidé au final. Et que du coup l’adjectif kafkaïen n’existerait peut-être pas aujourd’hui.

Biographie de Kafka

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